4-1: monstre second: GLOCK




Ils n’ont pas admis qu’ils avaient tort, qu’ils s’étaient trompé de gusse, résultat des courses je me suis retrouvé en un rien de temps – l’espace d’une mini-seconde ou d’un demi clin d’œil – nu dans un de ces petits garages où l’on peut entreposer des meubles entre deux déménagements ou cacher des armes d’assaut, nu et adroitement ligoté par mes tripes et cheveux, les nœuds étaient solides, à croire qu’ils savaient ce qu’ils faisaient ou du moins qu’ils avaient l’habitude ou voyaient en tout cas comment procéder. Mais non, puisqu’ils se posaient des questions de base entre eux comme « qu’est-ce qu’on fait ? », « ce serait pas mieux s’il était plus petit ? », « est-ce que quelqu’un aurait du feu ? », ils ne devaient pas être tout à fait des professionnels (les professionnels ne se posent jamais ce genre de questions, c’est ce qui les distingue), d’ailleurs ma perplexité à ce sujet disparut telle un petit nuage de fumée aspiré par une gorge quand je vis l’un d’entre eux, l’un de ces individus kidnappeurs, retirer son visage qui n’était qu’un masque pour laisser place à un autre visage qui était le sien véritable et monstrueux, difforme et envahi de mille et mille orifices douteux, geste qui ne manqua pas de me rappeler celui d’une actrice américaine dans une série de télévision je crois des années quatre-vingt arrachant à la fin du premier épisode sa cagoule de camouflage en peau de blonde humaine et révélant un faciès reptilien, impitoyable et cruel, ce qui signifiait qu’elle n’était pas la blonde qu’on pensait mais une extraterrestre infiltrée parmi nous dont l'objectif caché ultime était de tout mettre en oeuvre pour que sa race supplante l’humanité et conquière la terre – sorte d’anticipation science-fictive de série bis sur la théorie du grand remplacement des occidentaux du tertiaire par le prolétariat international indifféremment arabo-chinois ou sino-arabe – : ainsi, je compris qu'étant des monstres, ces gars s'en fichaient complet, comme de leur première chaussette, de passer ou non pour des professionnels.


Nu, lié par les tripes et les cheveux, une boule de mes propres mèches m’obstruant la bouche, un anneau très serré de mes propres viscères m’entravant les poignets, je ne pus pas faire grand-chose lorsque le monstre démasqué s’approcha de moi et sortit de sa gabardine grise un Glock 17, arme de poing d’une fiabilité sans faille conçue par la marque éponyme autrichienne GLOCK, qu’il appliqua contre ma tempe et dont l’extrémité du canon imprima dans ma chair temporale une manière de cercle dégénéré ou d’ovale pré-létal. « Si ce n’était pas lui ? », demanda l’un des monstres non démasqués, d’une voix sans doute contrefaite d'homme d'une quarantaine d'année; en guise de réponse agacée une langue bifide surgit de l’un des mille et mille orifices pointillant la figure du monstre démasqué puis s'agita un bref instant dans les airs, y traçant une série de symboles occultes: surgissement lingual bipartite et symboles aériens qui ne pouvaient signifier, selon mon pressentiment, qu’une seule chose, à savoir : « Tant pis, ce ne sera pas la première fois qu'on se trompe de client ».     


La suite, tout le monde la connaît.